27/03/2023 - 09H30 - Présidence Collegium Salle Gallé - 2 Avenue de la Forêt de Haye, 54516, Vandoeuvre-lès-Nancy

"Outils méthodologiques pour la modélisation et l'analyse de systèmes hybrides interconnectés "
(Thèse Simone MARIANO)

Résumé :
Des réseaux intelligents aux flottes de drones, en passant par les réseaux sociaux et les réseaux biologiques, les systèmes en réseau sont omniprésents dans notre vie quotidienne. Dans chacun de ces systèmes, nous pouvons identifier certaines caractéristiques de base récurrentes : des unités dynamiques élémentaires, appelées agents, interagissent localement et mutuellement via une topologie de graphe utilisant des informations locales, et donnent lieu à un comportement global collectif cohérent. Dans de nombreux cas, les systèmes en réseau présentent une dynamique en temps continu soumise à des changements soudains et instantanés qui peuvent survenir naturellement, comme dans le cas des neurones, ou être imposés par la synthèse, comme dans le cas des réseaux intelligents, où les actions de contrôle se font par le biais de dispositifs de commutation. Dans les deux scénarios, il est naturel de modéliser le système global comme un système dynamique hybride en réseau.

L'objectif de cette thèse est de démontrer la pertinence des outils théoriques hybrides pour modéliser et contrôler de manière distribuée des classes importantes de systèmes en réseau. Nous montrons d'abord comment les techniques hybrides peuvent être utilisées pour modéliser l'évolution des opinions dans un réseau social où les interactions entre les individus dépendent à la fois de leurs opinions passées et actuelles. Il s'agit d'une hypothèse raisonnable lorsque chaque individu connaît l'identité des autres membres du réseau. Nous présentons donc un modèle de dynamique d'opinions où chaque agent interagit ou non avec d'autres selon les valeurs actuelles et passée de leur différence d'opinion. Lorsqu'une interaction est (dés)activée, un saut se produit, conduisant à un modèle dynamique hybride en réseau. Les propriétés de stabilité de ce système hybride en réseau sont ensuite analysées et nous établissons que les opinions des agents convergent vers des accords/foyers locaux au fur et à mesure que le temps augmente, ce qui est un comportement caractéristique des modèles de dynamique d'opinions de la littérature.

Dans le deuxième cas d'étude, nous démontrons comment les techniques hybrides peuvent être utilisées pour surmonter des limitations fondamentales du couplage en temps continu pour synchroniser un réseau d'oscillateurs. En particulier, nous envisageons un scénario d'ingénierie où l'objectif est de concevoir les règles de couplage pour des oscillateurs hétérogènes afin de les synchroniser globalement et uniformément sur une phase commune. Chaque oscillateur a sa propre fréquence naturelle variant dans le temps et prenant des valeurs dans un ensemble compact. Ce problème est historiquement abordé dans la littérature en recourant au célèbre modèle de Kuramoto dont l'inspiration originale provient des réseaux biologiques et physiques. Cependant, le modèle de Kuramoto présente des inconvénients majeurs pour les applications en ingénierie, à savoir l'absence de synchronisation uniforme et la possibilité de verrouillage de phase en dehors de l'ensemble de synchronisation. Pour surmonter ces difficultés, les oscillateurs sont conçus pour être interconnectés via un réseau donné par un arbre sans leader par une classe de règles de couplage hybrides. Les couplages proposés peuvent reproduire localement le comportement des oscillateurs de Kuramoto tout en assurant la stabilité pratique ou asymptotique globale uniforme de l'ensemble de synchronisation, ce qui est impossible avec les modèles de Kuramoto. Nous montrons en outre que l'ensemble de synchronisation peut être rendu stable en temps fini de manière uniforme et globale en choisissant la fonction de couplage discontinue à l'origine. De nouveaux outils mathématiques sur les fonctions non pathologiques et les dérivées de Lie à valeurs dans un ensemble sont développés pour mener à bien l'analyse de stabilité.

Il apparaît que ce dernier ensemble d'outils mathématiques a une applicabilité plus large que le réseau hybride d'oscillateurs considéré. Nous exploitons donc finalement ces outils pour analyser les propriétés de stabilité des systèmes de Lur'e avec des non-linéarités continues par morceaux, grâce aux similarités entre les systèmes de Lur'e et la dynamique à temps continu décrivant les oscillateurs précédemment mentionnés. Nous étendons d'abord un résultat de la littérature en établissant la stabilité asymptotique globale de l'origine sous des conditions de secteur plus générales. Nous présentons ensuite des critères selon lesquels les systèmes de Lur'e avec des non-linéarités continues par morceaux bénéficient de propriétés de stabilité en temps fini de la sortie et de l'état. De plus, nous avons pu fournir des preuves algébriques des résultats que nous présentons, ce qui constitue une nouveauté en soi. Nous montrons la pertinence des outils fournis en étudiant les propriétés de stabilité de deux systèmes d'ingénierie dont l'intérêt est connu : les réseaux de neurones cellulaires et des systèmes mécaniques soumis aux frottements.
Jury :
- Rapporteurs : Simone Baldi Southeast University, Chine et TU Delft, Pays-Bas)
Francesca Ceragioli Politecnico di Torino, Italie)
- Autres membres : Christophe Prieur (examinateur - Gipsa-lab, CNRS)
Sophie Tarbouriech (examinateur - LAAS, CNRS)
Romain Postoyan (encadrant - CRAN)
Luca Zaccarian (encadrant - LAAS, CNRS et Università degli Studi di Trento, Italie)