"Spectroscopie optique tissulaire pour la caractérisation photobiologique de l'enveloppe cutanée à destination d'un usage clinique"
(Thèse Grégoire KHAIRALLAH)
Résumé :
Les carcinomes cutanés non mélanocytaires constituent un enjeu épidémiologique et économique majeur pourtant mal connu du grand public. Il est plus fréquent de voir l'attention focalisée sur les mélanomes, dont le pronostic est souvent dramatique mais qui sont heureusement moins fréquents. Du fait de leur polymorphisme, et de leur fréquence même (cancer le plus fréquent parmi les populations à peau claire), le diagnostic exhaustif de ces lésions et leur surveillance induisent un risque de faux négatifs à l'examen clinique et un retard diagnostic, source de séquelles fonctionnelles et esthétiques. Les erreurs diagnostiques sur les marges de résection sont source d'erreur et de reprises chirurgicales. Les outils diagnostiques dont nous pourrions disposer en clinique dans le contexte des salles d'intervention supposent un investissement conséquent et un apprentissage de l'opérateur, rédhibitoires dans le contexte médical actuel. Pour la prise en charge de ces lésions qui tendent à être de plus en plus fréquentes, il est nécessaire de mettre au point un outil d'aide au diagnostic d'un coût moindre, automatisable, permettant une analyse rapide point par point des lésions et de leurs marges. La spectroscopie optique peut répondre à cet ensemble de besoins : le dispositif SpectroLive, développé au CRAN et qualifié pour les études cliniques, implémente une modalité de spectroscopie optique bimodale (combinant autofluorescence et réflectance diffuse) résolue spectralement et spatialement.
Le but de cette thèse était d'étudier le dispositif médical SpectroLive sur le plan métrologique d'une part, pour en déterminer ses caractéristiques métrologiques, et sur le plan clinique d'autre part, pour en déterminer sa pertinence médicale. Nos caractérisations métrologiques ont montré que la spectroscopie optique telle qu'implémentée dans le dispositif SpectroLive peut détecter la fluorescence jusqu'à un profondeur cutanée d'environ 350 µm et jusqu'à une distance latérale (considérée en surface) d'environ 2,8 mm. Le développement carcinomateux se faisant dans l'épiderme (d'épaisseur moyenne 60 µm) et sur une surface variant fortement d'un patient à l'autre (zones le plus souvent circulaires de rayon variant entre quelques millimètres et quelques centimètres), on peut conclure de cette étude que SpectroLive permet de sonder tout ou partie d'un carcinome cutané, voire d'une marge de sécurité chirurgicale. La pertinence clinique du dispositif SpectroLive a été évaluée dans le cadre d'une étude évaluant le « statut redox optique » comme critère de discrimination entre 3 classes histologiques : les kératoses actiniques sont distinguées des carcinomes épidermoïdes dans 83 % des cas (sensibilité diagnostique) et de la peau saine dans 58 % des cas. Ces résultats restent à améliorer grâce aux méthodes d'intelligence artificielle (i.e. classification automatisée - sans connaissance a priori des spectres - par méthodes de machine learning). Enfin une étude ancillaire à l'étude de la spectroscopie optique a été menée pour développer une classification biologique de référence des kératoses actiniques afin de distinguer a priori celles présentant un potentiel évolutif vers un carcinome cutané de celles présentant un potentiel de régression. Les résultats de l'étude transcriptomique menée montrent des variabilités biologiques statistiquement significatives permettant de distinguer deux classes de kératoses actiniques. Un essai clinique complémentaire devra être mené pour évaluer cette hypothèse grâce à un suivi longitudinal des patients porteurs de kératoses actiniques.
Jury : | |
- Rapporteurs : | Anabela Da Silva-Directrice de Recherche, CNRS, Institut Fresnel, Marseille |
Jean-Luc Perrot-Professeur des Universités - Praticien Hospitalier, Dermatologue, CHRU de Saint Etienne | |
- Autres membres : | Jean-Marc Dinten-Chercheur, CEA-LETI, Département Biologie-Santé, Grenoble |